Né dans l’Oriental, à Touissit , en 1968, Mostapha Romli sait très tôt qu’il fera de la photographie son métier et son art, avec une ligne de conduite. Par lui, la photo ne doit pas être une reproduction mais plutôt une reconstruction de quelque chose. Avant le clic final, qui n’est qu’un point dans le temps.
Il mène également de front un travail visuel où la prise de vue photographique est, comme le souligne, Mostafa Chebbak «articulée en fonction de deux structures : une iconographique, l’autre plastique. Romli les rapproche l’une de l’autre, les recoupe pour enfin les fusionner dans un paradigme d’ensemble. Et c’est là que l’on se rend compte qu’un schéma conceptuel, finement élaboré, opère chez lui depuis toujours en filigrane».
Mostapha Romli réalise une première exposition intitulée «Ombres et Lumières» à Oujda en 1989. Suite logique de sa passion pour l’image, Il réalise, depuis 2006, de multiples travaux vidéo: reportages et documentaires. En 2010 une rétrospective de son travail est présentée à la Galerie Rive Gauche, en marge des 50 Jours pour la Photographie à Genève.
En 2013 il présente son thème Jihad Al Nikah à la galerie Brocken Gallery, Tokyo, Japon et la galerie Rivaria Gallery, Osaka, Japon. En 2017 Mostapha Romli dénonce le mariage des mineures avec son projet 20/21 présenté au Museo de Bellas Artes de Cluj, Rumanía et la Fondation Building Bridges Art Exchange, Los Angeles, USA.
Mostapha Romli est Directeur de la Résidence d’Artistes Ifitry et Président Fondateur de la Biennale Internationale de Casablanca.
Site internet : www.romli.com
Corps acéphale : Mostapha Romli, une épiphanie photoplastique
D’aucuns diront sûrement que, paradoxalement, l’objectif de Romli ne fixe que des fragments de corps. C’est se tromper de cible ou, disons, d’«objectif ». Romli cherche plutôt à orienter notre regard vers ce qui est oblitéré, vers ce que nous regardons constamment sans jamais vraiment voir. Cette oblitération et ce non vu ont un fondement : un iconoclasme multiséculaire.
Ces clichés évoquent la féminité à l’état pur, en maintenant toujours une distance méditative entre l’œuvre et le spectateur. Jamais Romli ne tombe dans le banal, le facile, le kitsch. Il esquive avec un bonheur jubilatoire le fatal piège de l’érotisme parce qu’il sait pertinemment que le passage de la photo d’art à la photo de charme est ténu et que le risque de confusion ne tient qu’à un imperceptible fil.
Laissons notre regard papillonner entre ces images. Laissons-le les approcher, sans a priori, pour elles-mêmes, simplement pour ce qu’elles suscitent en nous, comme émotion, comme ravissement. Le nu saisi par Romli n’est pas une vanité car la poésie l’habille et le pare, le nimbe et le sublime. Tant et si bien qu’il réussit à nous faire parvenir le murmure pudique de la chair dans ce qu’elle a de frémissant et de palpitant. Mais de quoi s’agit-il en effet ? Rien n’est, à proprement parler, voilé ; tout, par contre, est dévoilé : un fragment de corps saisi dans sa nudité natale abyssale. Ce corps est donc rarement pris en totalité. Il est constamment pris de dos, comme si le personnage (ou le modèle) était au loin, comme en dehors de la scène.