L’Association Marocaine d’Art Photographique (AMAP) organise, conjointement à l’Espace Expressions CDG et aux galeries Bab Rouah et Mohammed El Fassi du 09 au30 mai 2018 la 3ème édition des «Rencontres Photographiques de Rabat 2018 (RPR 2018)». En parallèle des expositions l’AMAP a prévue un programme riche et varié, à savoir, des tables rondes, des projections photographiques, des lectures de portfolios, ainsi qu’un marathon photo pour les jeunes.
Pour cette édition, dont le Directeur Artistique Jaâfar Akil, le thème choisi est: «Photos de mémoires, mémoires de photos »
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Photos de mémoires, mémoires de photos
Si l’être humain possède bel et bien une mémoire, il a pu très tôt en vérifier les aléas, les limitations ou le terrible handicap : les bénins et fréquents trous de mémoire ou encore dans les cas les plus sévères ce que la gériatrie désigne par la maladie d’Alzheimer. En tant qu’activité biologique et psychique, la mémoire de l’Homme ressemble à un gadget de fortune souvent victime d’amnésie. À ce propos, il est aisé de comprendre qu’une partie significative des progrès technologiques réalisés par l’Homme a été conçue pour pallier les défaillances de sa piètre mémoire : écriture, bande magnétique, photographie, disque dur, etc.
La photographie, produit d’une écriture avec la lumière, permet entre autres l’accès aux événements du passé et assume une importante fonction mnémonique. En effet, l’image fixe conserve, grâce à sa disponibilité et à la possibilité de la reproduire (Walter Benjamin), toutes les promesses de l’éternité…
En son temps, Baudelaire (Salon de 1859) avait demandé à l’invention photographique d’être « la très-humble servante » de la science, des arts et de la mémoire: « Qu’elle enrichisse rapidement l’album du voyageur et rende à ses yeux la précision qui manquerait à sa mémoire, qu’elle orne la bibliothèque du naturaliste, exagère les animaux microscopiques, fortifie même de quelques renseignements les hypothèses de l’astronome ; qu’elle soit enfin le secrétaire et le garde-note de quiconque a besoin dans sa profession d’une absolue exactitude matérielle, jusque-là rien de mieux. Qu’elle sauve de l’oubli les ruines pendantes, les livres, les estampes et les manuscrits que le temps dévore, les choses précieuses dont la forme va disparaître et qui demandent une place dans les archives de notre mémoire (…)».
Serge Daney a écrit que « Le passé ne cesse de passer ». S’il est bien connu à la suite d’un Héraclite, qu’on « ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve », la photographie a permis une sorte de bain de jouvence, celui de revenir à loisir sur les temps révolus car « C’est vivre deux fois que de pouvoir jouir de la vie passée » (Martial, X, 23).
Dans cette perspective, l’Homme photographie pour se constituer une archive sûre, consultable à volonté et pour alléger et désencombrer sa mémoire: « On photographie les objets pour les chasser de son esprit » (Franz Kafka). La photographie est considérée comme le moyen le plus sûr pour conserver nos souvenirs et les événements de notre histoire. Ainsi, elle nous permettrait de constituer et de sauvegarder les “archives de notre mémoires”. Elle est à la fois un rempart contre l’oubli et une clef du temps.
Pour cette 3ème édition des “Rencontres Photographiques de Rabat 2018”, l’AMAP a choisi la thématique “Photos de mémoires, mémoires de photos” afin de soulever les problématiques associées à ces deux notions. Ce thème nous permettra d’ouvrir quelques perspectives susceptibles d’attirer l’attention sur les divers usages d’une photographie de plus en plus omniprésente dans le monde actuel, et de questionner les différentes corrélations objectives et subjectives qui la relient à la mémoire individuelle et collective.
